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Photo du rédacteurJulien Domenech

Co-branding dans l'hôtellerie: Le Royal Monceau x Homer Lobster

En juin 2018, un concept street food s’invite à la table des grands. Repéré en mai 2018 par le propriétaire du Palace opéré par Raffles, Homer Lobster, concept de street food réalisant des sandwichs briochés au homard (ou lobster roll outre-atlantique), se voit offrir la possibilité de vendre ses réalisations dans la cour d’été du prestigieux hôtel situé avenue Hoche. Comment ne pas y voir à première vue une collaboration à l’aspect dissonant ? D’un côté, un concept venu de la rue et plus précisément des ports de pêches anglo-saxons. De l’autre, un palace parisien, symbole d’excellence, de raffinement, de cuisine gastronomique et de codes qui dénotent l’image bien « académique » de ce genre d’établissement. Et si le Palace semble avoir fait ses gammes sur les bancs de l’école, la street food à quant à elle bien fait l’école buissonnière. Si l’on se rend dans ce dernier généralement vêtu de sa plus belle tenue, le concept de street food, lui, n’attend pas de ces clients que l’on vienne habillé de manière « descente ». Le concept de street food n’est d’ailleurs pas souvent une destination en soit. A l’inverse du Palace où l’on y vient aussi pour profiter d’un bel endroit, la cuisine de rue s’effectue souvent dans des boutiques assez étroites. Malgré ces nombreuses distinctions, permettre à un nouveau concept de restauration de s’installer n’est-il pas un moyen pour Le Royal Monceau d’attirer et de fidéliser la clientèle « Millenials » et celle de la « Génération Y » ? Ne faudrait-il pas casser les codes pour mieux les reconstruire ? Dans l’imaginaire collectif, la sphère des palaces peut sembler inaccessible. Accusé d’être trop normé ou sophistiqué, un Palace reste un lieu à part dans l’hôtellerie française. Aussi, instaurer un nouveau point de restauration, différent de l’offre habituel permet de toucher une clientèle différente. Le Royal Monceau casse ainsi plusieurs barrières "d'entrées" qui pouvaient se poser face à une clientèle jeune souvent peu à l’aise avec les codes des restaurants gastronomiques situés dans les Palaces. Avec l’offre Homer Lobster, il n’y a pas besoin de réserver, pas besoin d’attendre deux heures pour venir à bout d’un menu en 7 plats, ni même de se poser la question de savoir quels couverts utiliser… Cette nouvelle offre se positionne donc comme une opportunité pour le Palace opéré par Raffles d’attirer une clientèle différente. Pourtant, comment implanter une offre indépendante dans son hôtel sans pour autant « cannibaliser » ses autres offres de restauration ? On le voit bien, ce partenariat semble faire état d’un équilibre délicat à maintenir : un hôtel est-il dès lors en mesure de profiter des potentialités offertes par un concept food externe sans fragiliser le revenu de ses autres offres de restauration ?




Ouvrir un nouveau point de restauration, c’est avant tout évaluer la nature de cette nouvelle offre : son identité et son positionnement sur un marché concurrentiel. En s’intéressant de plus près aux autres points de vente de l’hôtel dans le cas du Royal Monceau, on remarque que chacun des quatre restaurants ont des identités bien distinctes. Le Matsuhisa Paris revisite la cuisine traditionnelle japonaise, Il Carpaccio créé une cuisine italienne sophistiquée, La Cuisine s’occupe de l’offre de petit-déjeuner ainsi que du brunch, tandis que Le Bar Long offre une carte de plats « emblématiques des Palaces parisiens ». On voit ainsi que les différents de points de vente de l’hôtel se différencient par leur nature (offre de petit-déjeuner, déjeuner et dîner gastronomique) mais aussi de par leur offre (cuisine japonaise, cuisine asiatique, cuisine française moderne). Le concept Homer Lobster ne dérange pas à la règle et se positionne parfaitement sur un segment de niche dans l’offre de restauration du Royal Monceau mais aussi dans l’offre de restauration offert par les Palaces parisiens. Mais cette nouvelle offre de restauration n’est pas seulement une offre de restauration singulière, indépendante des autres points de vente.


En effet, ce nouveau point de vente est aussi une façon de capter un segment de clientèle différent de celui déjà attiré par Il Carpaccio ou Matsuhisa Paris. Mais une fois que le client d’Homer Lobster découvre cette version décontractée de la restauration de Palace, une fois que le client est dans l’hôtel, il est alors facile de lui montrer que l’image qu’il s’était faite du restaurant gastronomique est peut-être obsolète. En effet, comment convaincre votre clientèle que votre offre de restauration n’est pas celle qu’il croit autrement qu’en le lui laissant voir par lui-même ? Le client qui aura fini de manger passera sûrement devant la salle d’un restaurant et se rendra alors compte que l’image guindée qu’il s’était faite de la haute gastronomie est datée. D’un point de vue financier, la démarche semble déboucher sur un TRI (Taux de Rentabilité Interne) nettement positif. Le rapport entre les flux entrants et les flux sortants liés au projet est largement positif. La production des lobster roll ne nécessite pas d’installation importante et peu s’accommoder d’un espace restreint pour leur confection. Les frais de personnel sont inexistants tant ils sont supportés par les serveurs du Le Bar Long et l’enseigne Homer Lobster. De son côté, le Palace parisien récupère un fees sur la vente des lobster roll. Par ailleurs, le coût d’acquisition d’un nouveau client pour la nouvelle offre de restauration est bas tant le street food profite de la structure et des potentialités du Palace parisien. L’ouverture de ce nouveau point de restauration limite par ailleurs le recours à des investissements CapEx (Capital Expenditure) de type MCI (Major Capital Improvement), tant cette offre de restauration ne nécessite pas d’infrastructures lourdes tels que peut le supposer un restaurant traditionnel. Mais au-delà du retour sur investissement financier, la collaboration est génératrice de valeur sur le long terme.


Elle permet aussi de répondre à moindre frais au positionnement stratégique de l’hôtel qui, possédant aussi une galerie d’art ou une salle de cinéma, se place comme un lieu d’expériences contemporaines et haut de gamme. Ce type d’initiative permet aussi de réagir aux changements incessants des besoins des consommateurs. La tendance lifestyle qui caractérise aujourd’hui les comportements des consommateurs se caractérise par l’absence de besoins ou de désirs déterminés, figés. « Le mode de consommation lifestyle » est en constante évolution et ne peut être définit par un ensemble de critères et encore moins par une seule offre spécifique. Cette initiative va dans ce sens.




La collaboration entre Le Royal Monceau et Homer Lobster est alors un avantage pour la marque de luxe Raffles, tant elle permet d’alimenter son adresse parisienne avec une clientèle « foodie », jeune et amatrice de nouvelles découvertes. L’offre se positionne alors comme un moyen d’ouvrir les portes d’un lieu intimidant à une clientèle peu habituée aux Palaces. Néanmoins, en ouvrant Homer Lobster, aux mêmes horaires que ces autres restaurants, le Palace peut craindre de limiter le revenu de ses autres points de vente. La solution ? Choisir de ne commercialiser qu’un nombre limité de sandwichs au homard. Un client qui viendrait au mauvais moment se verrait alors rediriger vers un autre restaurant de l’hôtel. Mais attention à ne pas frustrer un client qui à l’habitude de se voir tout offrir… Dans l'hôtellerie économique et mid-scale, l'initiative pourrait paraître intéressante. Les hôtels possèdent souvent une salle de petit-déjeuner qui reste la plupart du temps inutilisée en dehors des heures d'ouverture. L'appel à un concept de street food externe peut alors permettre de créer une offre de restauration jusqu'alors inexistante pour le repas du soir. L'hôtel n'engagerai aucun frais. L'effort humain et matériel nécessaire au déploiement de l'initiative suppose en revanche que le concept street food soit à même de générer des bénéfices de cette activité.


Finalement, réussir son cobranding c'est:

- définir la clientèle que l'on souhaite toucher.

- analyser les potentialités de l'hôtel qui peuvent être mis à disposition d'un partenaire externe.

- trouver l'offre que l'on souhaite mettre en place.

- former le personnel à intégrer l'offre dans le storybranding de l'hôtel.

- Tester et "pivoter" (les entrepreuneurs et start-up comprendront).





Apprenez et décidez.



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