Lorsque l’on s’approche du MOB Hotel de Saint-Ouen, le passé de la ville semble ressurgir et nous projette dans les mémoires industrielles de la ville. Des briques rouges en passant par les larges fenêtres, jusqu’au portail en bois, tout participe à rappeler cette atmosphère. Un détail se détache cependant de la façade. Ce détail c’est une porte d’un orange hermès et son heurtoir en forme de dragon ; comme si pénétrer dans cet espace relevait d’une décision, d’un choix assumé car on ne peut se cacher. Mais attention, une petite plaque nous prévient, interdiction d’utiliser le heurtoir : « Vous êtes ici chez vous, Entrez sans frapper. »
Une fois le seuil franchit, l’hôtel et ses différents espaces s’offre à nous. Guidé par une responsable des Ressources Humaines, nous entamons une discussion sur l’esprit de l’hôtel et ambition.
Maïmonide of Brooklyn (MOB) Hotel de Saint-Ouen a ouvert le 9 mars 2017, avec pour ambition de « casser les codes de l’hôtellerie ». L’univers hôtelier créé par Cyril Aouizerate, philosophe entrepreneur, est novateur. Si la chambre comporte toujours un lit pour dormir, un certain nombre de parti-pris font en effet écho à l’ambition de l’établissement. Avec des réceptionnistes en t-shirt, basket et jean, partageant le lobby avec un pop-up store éphémère d’un créateur local, le lieu s’affirme en espace de découverte. Le MOB Hotel nous pousse à la découverte. D’abord car la télévision n’a plus sa place dans la chambre de l’hôtel (il est cependant possible de demander un iPad à la réception si l’envie regarder une sér.. la météo vous prend) et puis parce que l’hôtel se positionne comme un véritable lieu de vie. Les larges espaces communs sont les témoins de ce positionnement. L’été vous pouvez par exemple profiter de projections de film en plein air grâce à l’écran géant installé dans la cour centrale de l’hôtel. Au-delà de cela, tout au long de l’année, l’hôtel accueille ce que le site du MOB présente comme des « happenings ». Il est ainsi possible de participer à un atelier de cinéma argentique, participer à une séance de yoga ou encore danser autour d’une soirée animée par un DJ. L’atmosphère se veut culturelle.
L’hôtel s’insère ainsi dans la vie des gens en les bousculant, en leur faisant vivre des expériences singulières, en les provocant : des bouquins dans la chambre, une guitare qui traîne, un matelas gonflable… Car oui, si l’un de vos amis, venu profiter d’une soirée éclectique au sein du MOB loupe le dernier métro, il peut alors profiter d’un couchage dans la chambre que vous occupez ! Le MOB Hotel est un lieu de « partage ». Cette valeur est retranscrite à merveille par l’hôtel parisien. Dans le restaurant de l’établissement, les grandes tablées sont privilégiées. Pour la clientèle séminaire, l’hôtel tend toujours à leur proposer des plats à partager pour les repas. Sur les différentes terrasses de l’hôtel, les barbecues se multiplient et poussent les groupes à cuire eux-mêmes leurs grillades. L’une des terrasses possède même un potager partagé par les voisins du quartier.
Le MOB Hotel n’est pas un lieu clos, fermé sur lui-même. C’est un lieu ancré dans son quartier et qui participe à le faire vivre. Propriétaire d’un local situé en face de l’hôtel, le MOB a décidé de le louer gracieusement à des créateurs de la slow fashion. Le MOB Hotel se positionne ainsi en créateur de lien social. En plus de cela, MOB Hotel se positionne comme un véritable acteur d’une hôtellerie davantage respectueuse de l’environnement. Sur la terrasse-potager, un compost permet de recycler une partie des déchets du restaurant. Les savons en chambre sont rechargés grâce aux pompes à gel douche et le toit de l’hôtel accueille une ruche… Plus que de simples actions, c’est un état d’esprit que le MOB essaye de développer. Un échange avec le chef de réception, nous apprend que l’établissement réfléchit, en collaboration avec ses employés, à remplacer les pompes à shampoing par un shampoing solide. Mais la transition prend du temps car elle se confronte à des obstacles opérationnels et de faisabilité. Dans quoi allons nous conserver notre savon solide en chambre? Un petit bac en plastique… et l’initiative perd de son sens. L’hôtel pousse à la réflexion. Si vous avez la chance d’utiliser les salles de séminaires, des schémas muraux sont là pour vous rappeler avec un peu de légèreté les grands défis sociétaux d’aujourd’hui : consommation énergétique, égalité des sexes, transition écologique,etc…
Le projet MOB est donc un projet qui se construit dans le temps. Chaque nouvelle réflexion le fait évoluer vers « une certaine forme d’éthique ». Le MOB se construit aussi ailleurs, dans de nouvelles villes à explorer. Une MOB House sera bientôt ouverte à Saint-Ouen en face de l’hôtel, et permettra d’accueillir une résidence étudiante (opérée par l’Université Paris Dauphine) et des bureaux (opérés par Keys Management) ainsi que des chambres d’hôtels. En 2020, un MOB Hotel de 144 chambres verra le jour à Washington D.C. et un autre à Gare de l’Est. En 2021, c’est Bordeaux qui verra un projet d’ouverture naître sur les quais de la Brazza et en 2022… c’est Los Angeles qui accueillera le projet co-créé par Cyril Aouizerate, Philippe Starck et Serge Trigano (fondateur de l’enseigne Mama Shelter, comme si le nouveau-né de Monsieur Trigano suivait son grand frère).
Au sortir de cette visite, on a l’impression d’avoir découvert autre chose : un hôtel à l’identité affirmée. De par son architecture, la fourniture en mobilier de ses chambres mais aussi son ambition, le MOB Hotel de Saint-Ouen se distingue. Et au moment de s’éloigner de cet établissement, après avoir refermé la porte orange, de ne plus apercevoir que la brique rouge, on se rappelle le passé toulousain de Cyril Aouizerate et on se dit que ça serait vraiment génial si ces briques étaient là pour nous rappeler la ville chantée par Nougaro.
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